Dans le processus abolitionniste, la voie de la Révolution française doit être considérée comme atypique en raison de son caractère insurrectionnel et de la radicalité de l’abolition basée sur des critères égalitaires et fraternels. Dès 1789, des députés aux Etats-Généraux interrogent la société française en devenir sur la nécessité de maintenir l’esclavage dans les colonies, car en France, il n’y a pas d’esclave : « Le service des esclaves est moins cher que celui des blancs, & ce service, qui est absolu, plaît à l’amour propre. Sans les voix prohibitives de France, le Royaume serait rempli d’esclaves nègres. Ainsi les blancs, pourraient remplir dans nos colonies le service de la domesticité, celui des canots passagers, celui des ouvriers de toute espèce ; enfin, si on ne peut pas détruire l’esclavage, on diminuera du moins par cette voie le nombre d’esclaves. C’est autant de gagné en faveur de l’humanité »[1].
Dans 38 cahiers de doléances (Aisne, Gironde, Ille-et-Vilaine, Indre-et-Loire, Jura, Landes, Loir-et-Cher, Loire, Maine et Loire, Moselle, Nord, Oise, Orne, Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées, Saône-et-Loire, Paris, Yvelines, Somme, Vienne) les rédacteurs traitent de l’esclavage. L'article 29 du cahier de doléances du tiers état de Champagney, en 1789, qui demande explicitement l'abolition de l'esclavage. Dans l’Ain, aucune traces de cette abolition, même si Sonthonnax, qui le fera en 1792 à Saint Domingue est natif d’Oyonnax dans l’Ain. En effet, il est probable que les bressans et bugistes n’aient jamais vu un noir enchainé[2] pour prendre conscience qu'il y avait des situations pires que celle qui était la leur et qu'ils voulaient voir meilleure.
En France, outre la Société des Amis des Noirs, qui propose une abolition par la Loi et progressive afin de ne pas générer de guerre civile [3], l’abolitionisme se matérialisera à travers Sonthonnax à Saint Domingue puis avec le décret du 4 août 1792 accordant la pleine qualité de citoyens aux seuls hommes libres de couleur et le décret du 16 pluviôse an II qui abolit l’esclavage.
[1] Agenda d’un député aux Etats-Généraux, 1789. Ancienne coll. P. Croyet.
[2] Contrairement aux chaînes de bagnards ; Bourg et Trévoux deviennent un passage obligatoire des chaînes venant de Paris et de Bretagne qui conduisent les galériens à Marseille. De 1740 à 1748, les passages de ces chaînes à Bourg entraînent des réquisitions, fournitures de vivres et de voitures, et des devoirs comme les soins à donner à un contrebandier que l'on ne peut mettre à la chaîne parce qu'il est à toute extrémité.
[3] La société des Amis des Noirs, fondée dès 1788, ne se montre pas seulement comme un regroupement de publicistes et de penseurs des Lumières cherchant l’abolition, elle propose une solution de rechange à la fin inéluctable de la colonisation esclavagiste par l’établissement d’un marché franco-africain qui ruinerait la nécessité de la traite et donc de l’esclavage.
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