nivôse an III : le Bugey résiste aux thermidoriens

2.63 La fraternité Bugiste

 

Alors que Bourg donne dans la réaction, le 5 nivôse, la municipalité de St Rambert reconnaît le civisme des frères Juvanon. Informé de l’ordre de Legot et du Comité de Sûreté Générale de faire libérer les sans-culottes, Pierre Antoine Buget écrit, le 11 pluviôse, au nom de la société populaire de Bourg au district de St Rambert afin d'obtenir d’elle une dénonciation de ses membres détenus. Buget se justifie en annonçant aux administrateurs du district de St Rambert "que pendant la mission. . .d'Albitte et de Méaulle , il a existé une criminelle coalition. . .pour opprimer le peuple et vexer de la manière la plus tyrannique les bons citoyens "1. Ainsi Buget qualifie-t-il ceux qu'il juge aptes à gouverner la vie locale, c'est à dire les hommes issus de la haute bourgeoisie, vainqueurs en 1789, contre ceux qui n'auraient jamais dû quitter leur milieu social en aspirant à mieux. Les modérés jadis combattus retrouvent leur force et s'acharnent férocement sur ceux qui, au temps de leur tutelle politique les brimaient : "on. . .classera. . .les preuves. . .dans un nouveau tableau analytique qui sera distribué dans le département, et qui convaincra le peuple que les patriotes exclusifs qui s'y sont rendus si célèbres, n'étaient que des accapareurs de places, des égorgeurs, des brigands et des fripons"2. Il demande que l'on communique à Brangier aîné, archiviste du district de Bourg, les "projets d'assassinats, vols, dilapidation de la fortune publique, propos incendiaires, terrorisme, avilissement de la Convention Nationale, correspondance avec les grands coupables. . .dépravations des mœurs, provocations au pillage et partage des terres; tels sont les crimes commis dans ce département et dont il faut signaler les auteurs ou les complices"3. Mais contre toute attente, le 19 pluviôse, la femme Juvanon obtient le soutien écrit de 92 citoyens de St Rambert reconnaissant le civisme des frères Juvanon. Si les thermidoriens bressans n’arrivent pas à obtenir les faveurs de St Rambert, c’est d’elle même, le 6 ventôse, que la société populaire de Pont-de-Veyle sollicite l'épuration des terroristes et leur traduction en justice.

Ainsi, la Terreur et ses moyens passent aux services de ceux qui en étaient les victimes ; devenant ainsi les bourreaux de leur anciens oppresseurs. A Bourg, les réactionnaires essayent de soulever l'opinion contre les patriotes. Joly et Debost en tête, lancent des appels au meurtre : "citoyens , nous devons avoir l'œil ouvert sur tous ceux qui vous désignaient pour victimes. . .les Désisles, les Rollet, les Chaignot, les Merle et les Juvanon, tous les brigands en premier et en second ordre, nous les poursuivrons sans cesse. . .citoyens, surveillés, dénoncés ces scélérats, mais si la sûreté des personnes et des propriétés venaient encore à être compromise. . .vous n'avez qu'une mesure à prendre; frappés que vos ennemis ne soient plus"4.

 

d'après la thèse de doctorat d'histoire de Jérôme Croyet, "sous le bonnet rouge", soutenue et obtenue en 2003 à l'Université Lumière Lyon II

 

1 Lettre de Buget à l'administration du district de St Rambert. A.D. Ain 13L18.

2 Lettre de Buget à l'administration du district de St Rambert. A.D. Ain 13L18.

3 Lettre de Buget à l'administration du district de St Rambert. A.D. Ain 13L18.

 

4 Discours de Joly, n.d. A.D. Ain 2J 23.

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