germinal an II : les conséquences de la mort d'Hébert dans l'Ain

2.56 Les rats quittent le navire

 

Le 23 germinal an II, la [1] annonce Dorfeuille aux sociétaires. Il commente les divisions entre patriotes en rejetant la faute sur des aristocrates inexistants, brandissant de nouveau le spectre du complot. Dorfeuille réclame l’union face au danger qui menace la République : “ ne nous laissons pas vaincre en vertu, après les conspirateurs, guillotinons nos passions, il ne faut donc écouter ni le cri de la vengeance, ni inimitié personnelle, l’union fait la force[2]. Toutefois, il se fait le garant de la réconciliation en déclarant que les deux partis ont commis des erreurs qu’ils doivent oublier pour se retrouver à boire ensemble la prochaine décade : “ nous avons été égarés tous[3] s’écrie-t-il. Mais face aux dissensions persistantes, il change de registre et “annonce que son collègue Millet et lui sont envoyés pour exercer un ministère de paixAlbitte….a été affligé en apprenant leurs divisions et lui a dit, presque les larmes à l’œil, ainsi qu’à son collègue, de venir rétablir la paix ou d’y mourir ” [4]. Millet prend la parole et témoigne de la tristesse d’Albitte d’apprendre que les sans-culottes de Bourg se brouillent : “ils doivent se juger avec réserve, se faire apercevoir leur tort sans aigreur, un homme ne peut être toujours égal dans ses actions, mais ses fautes sont réparablesen se jugeant trop rigoureusement, les patriotes bientôt se verraient réduits à un trop petit nombre ”[5]. Les deux commissaires, chargés d'examiner à nouveau les détenus, cherchent à calmer l’ardeur de ceux-là même qu’ils avaient stimulés quelques décades auparavant : “il faut qu’on use avec ménagement des dénonciations, elles aigrissent, animent les uns contre les autresil invite la société à ne pas rejeter trop facilement de ses membres ” [6]. Martine, en désaccord, dit que l’on désigne comme hébertistes “ceux qui n’ont jamais professé que le dévouement le plus absolu à la Convention…ceux qui ont été fermes au 31 mai ”[7]. Alban, Duclos, Gallien, Frilet et Chaigneau s’étonnent aussi du sujet de discussion et soutiennent l'idée de nouvelles exclusions. Les sans-culottes se retranchent et s’isolent, bien qu'ils pensent encore que “plus on calomnie les sans-culottes plus ils seront unis ”[8]. Chaigneau accuse indirectement Convers d’être à l'origine des troubles qui agitent la société et la ville de Bourg, quant à Alban, il rejette la faute sur les détenus.

La chute des hébertistes supprime l’autonomie politique des sans-culottes mais supprime aussi un soutien de poids aux Jacobins qui se mettent une partie de la population à dos en établissant le maximum des salaires alors que la disette dure.

Dans l’Ain, les sans-culottes commencent à être victimes de leur admiration pour Paris, où Dorfeuille propose d’envoyer une députation de deux membres pour lutter contre la calomnie et démontrer les principes de la société au Comité de Salut Public. Le lendemain, à la tribune de la société populaire de Bourg, Millet et Dorfeuille plaident la cause de Convers. Blanc-Désisles, bien qu'absent de la séance de la société populaire, réalise que ses collègues sont allés trop loin et en informe Merlino.

 

d'après la thèse de doctorat d'histoire de Jérôme Croyet, "sous le bonnet rouge", soutenue et obtenue en 2003 à l'Université Lumière Lyon II

 



[1] Discours de Dorfeuille à la société populaire de Bourg, 24 germinal an II. A.D. Ain 13L 9.

[2] Discours de Dorfeuille à la société populaire de Bourg, 24 germinal an II. A.D. Ain 13L 9.

[3] Discours de Dorfeuille à la société populaire de Bourg, 24 germinal an II. A.D. Ain 13L 9.

[4] Discours de Dorfeuille à la société populaire de Bourg, 24 germinal an II. A.D. Ain 13L 9.

[5] Discours de Dorfeuille à la société populaire de Bourg, 24 germinal an II. A.D. Ain 13L 9.

[6] Discours de Dorfeuille à la société populaire de Bourg, 24 germinal an II. A.D. Ain 13L 9.

[7] Discours de Dorfeuille à la société populaire de Bourg, 24 germinal an II. A.D. Ain 13L 9.

[8] Discours de Dorfeuille à la société populaire de Bourg, 24 germinal an II. A.D. Ain 13L 9.

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