ventôse an II : regain d'attaques contre Gouly

2.50 Regain d’attaques contre Gouly : les sans-culottes trop confiants en leur succès

 

Le 6 ventôse, Dorfeuille, qui prépare son retour dans l'Ain via Lyon, se rend au club des Jacobins afin de passer au scrutin épuratoire. Gouly, de son côté, apprenant qu’une nouvelle dénonciation contre lui vient d’arriver au Comité de Salut Public, lui demande, le 7 ventôse, de lui fournir toutes les pièces qu’il a fait parvenir au Comité de Sûreté Générale afin de se disculper ; n’ayant pas rendu de compte à la tribune de la Convention, Gouly rejette les accusations faites à son encontre notamment par les représentants à Lyon, tout en ne désirant pas les “inculper. . .(car ils) ont été égarés sur mon compte par des hommes signataires d’arrêtés liberticides, qui voulaient accaparer ma confiance, et qui la convoitaient pour assouvir leurs passions et cacher leurs fautes. . .je n’ai agi effectivement que sur les renseignements qui m’ont été donnés du peuple Assemblée, par les sociétés populaires, par les sans-culottes que j’ai fait appeler pour les consulter : s’ils m’ont trompé, je ne puis en être responsable, leur ayant constamment et publiquement, comme en particulier demandé, au nom de la patrie, la vérité, toute la vérité et rien que la vérité ”[1].

A Bourg, les sans-culottes demandent à la Convention le report du décret du 28 pluviôse mettant en exergue la liaison entre les fédéralistes de l'Ain et ceux de Lyon. Durant la séance de la société populaire, Juvanon intervient pour solliciter une adresse de soutien en faveur de Javogues, ce “brave montagnard connu par ses opérations et ses mesures révolutionnaires qui ne tendaient qu’à sauver la république puisqu’elles n’avaient pour but que l’intérêt général, celui du peuple[2]. Dans cette adresse, les sans-culottes ne font pas que soutenir Javogues, ils espèrent sa nomination dans l’Ain en cas de départ d’Albitte : Javogues fait alors l’unanimité dans le département[3]. Le lendemain, alors qu'Albitte et Lajolais se préparent à quitter Bourg pour gagner Chambéry, Alban et Gay se rendent auprès du représentant et lui font part de leur résolution révolutionnaire : "Représentant, général, vous partez tous les deux mais soyez tranquilles, ça ira ou le diable m'emportera. La Terreur est à l'ordre du jour. Tu peux partir quand tu voudras, je la ferai exécuter et à ton retour ça ira mieux que tu ne crois"[4]. Rollet-Marat pour sa part ne fait pas de grandes déclarations au représentant, mais se plaint des prêtres retirés dans le Jura[5]. En effet, malgré la rigueur du serment d'Albitte, certains prêtres abdicataires se rendent régulièrement dans le Jura à fin de célébrer l'office, de marier et de baptiser. La municipalité de Bourg déplore également le fanatisme et l'aristocratie qui règnent dans le Jura : le 8 ventôse, Alban propose au conseil municipal de faire une adresse aux représentants dans ce département, Robespierre-le-Jeune et Lejeune, pour qu'ils adoptent les arrêtés d'Albitte[6].

Le 11 ventôse, Alban lit aux sociétaires de Bourg une lettre de Merle et de Dorfeuille adressée à Blanc-Désisles qui “les instruit de leurs démarches et de la franchise envers Gouly ; il annonce que de grands moyens sont à l’ordre du jour au Comité de Salut Public pour reprendre Condé et Valenciennes et envahir le pays de la Belgique. Il annonce en outre qu’il à été surpris de voir Gouly à la tribune des Jacobins, mis il espère. . .qu’il en descendra [7]. Dans la capitale, après des plaintes contre les arrêtés d’Albitte, Gouly, Deydier et Gauthier des Orcières, dénoncés par Merle et Dorfeuille, attaquent directement les sans-culottes et poussent le Comité de Salut Public à prévenir le 11 ventôse Albitte que parmi les hommes qui l'entourent se trouvent, "dit-on, des émigrés, des contre-révolutionnaires décidés, qui se sont approchés de toi pour surprendre ta confiance et ta bonne foi "[8].

 

d'après la thèse de doctorat d'histoire de Jérôme Croyet, "sous le bonnet rouge", soutenue et obtenue en 2003 à l'Université Lumière Lyon II

 



[1] Lettre de Gouly au Comité de Salut Public, 7 ventôse an II. BOULOISEAU (Marc) : Actes du Comité de Salut Public. Supplément, 2e volume, Paris, 1971.

[2] Registre de délibérations de la société des sans-culottes de Bourg, A.D. Ain 13L 9.

[3] D’autres sociétés populaires dont celle de Trévoux et de Bâgé envoient le même type d’adresses.

[4]Témoignage page 25 du cahier de témoignage A. A.D. Ain ancien L219.

[5]Lettre d'Albitte à Rollet-Marat, du 18 ventôse an II. A.D. Ain 13L 60.

[6]Registre municipal cité par Ph. LEDUC : Histoire de la Révolution dans l'Ain. Tome 5 page 67.

[7] Registre de délibérations de la société des sans-culottes de Bourg, A.D.Ain 13L 9.

[8]Lettre du Comité de Salut Public à Albitte du 11 ventôse in Recueil des actes du Comité de Salut Public avec la correspondance officielle des représentants en mission. Tome 11.

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