28 pluviôse an II : une trahison

2.47 La trahison du 28 pluviôse

 

A Paris, les dénoncés de la sans-culotterie de l'Ain s'agitent. Le 28 pluviôse, Gouly décrit à Paris la tournure politique que prennent les événements révolutionnaires dans l'Ain. Quant à la correspondance qu'échange de plus en plus fréquemment Gauthier des Orcières avec ses cousins Gauthier-Cincinnatus et Gauthier-Murnans, elle soulève une certaine inquiétude chez Deydier et Ferrand qui pensaient que leur collègue avait rétablit le calme dans l'Ain, assuré la main mise politique de la bourgeoisie sur les administrations en essayant d'effacer l'erreur fédéraliste de ses amis[1]. Ils se rendent compte que ce n'est pas le cas. Sentant la situation politique départementale leur échapper, Gauthier des Orcières, Deydier et Ferrand se plaignent de la situation dans l'Ain à la Convention et au Comité de Sûreté Générale. Soutenus par la rancœur de Gouly, les Gauthier des Orcières, Merlino et Deydier tentent d'enrayer le processus de renouvellement de la classe dirigeante par les sans-culottes en faisant adopter un décret, le 28 pluviôse, par la Convention un décret qui interdit aux  "citoyens et aux membres des corps administratifs du département de l'Ain. . .d'être traduits devant la commission extraordinaire (de Lyon) pour raison d'écrits ou arrêtés fédéralistes auxquels ils auraient coopéré " [2]. Sans ce décret “un plus grand nombre y aurai péri[3]. Gauthier des Orcières rejette la faute de la répression sur Couthon et Collot d’Herbois qui “provoquèrent ou ordonnèrent un grand nombre d’arrestation dans tous les départements qui avoisinaient Lyon[4]. Dubois-Crancé et Deydier certifient les dires de Gauthier.

Le 3 ventôse, Gauthier des Orcières et Deydier, soutenus par Gouly, dénoncent au Comité de Salut Public certains arrêtés d'Albitte. Ils ne cherchent pas à nuire particulièrement au dieppois mais plutôt à atteindre les sans-culottes qui ravissent les places administratives de leurs amis et qui voudront tôt ou tard ravir les leurs. Gauthier des Orcières plus particulièrement cherche à compromettre les sans-culottes et les dépeindre comme des ennemis de Robespierre [5]. Il n'incrimine pas Albitte, qu'il considère comme un porte-plume[6], mais tente de préserver l'initiative politique de ses amis. Dès lors s'engage un bras de fer politique entre la députation de l'Ain et les sans-culottes, chacun s'appuyant sur une autorité, Comité de Sûreté Générale et Convention pour les premiers et réseau sociétaire pour les seconds.

 

d'après la thèse de doctorat d'histoire de Jérôme Croyet, "sous le bonnet rouge", soutenue et obtenue en 2003 à l'Université Lumière Lyon II

 



[1] Suite à la chute de Lyon en octobre 1793, Gauthier des Orcières, fit rentrer dans l'Armée des Alpes, François-Philibert Bellay (chirurgien né à Lent) qui combattit dans les troupes fédéralistes Lyonnaises et fut membre de la municipalité Lyonnaise; alors qu'il devait sévir contre lui. DUFAY : Galerie Militaire de l'Ain, page 82.

[2]Décrêt de la Convention du 28 pluviôse an II, A.D. Ain 1L non classé.

[3] Dossier de radiation de la liste des émigrés de Céard, 25 frimaire an V, A.D. Ain série 2L non classé.

[4] Dossier de radiation de la liste des émigrés de Céard, 25 frimaire an V, A.D. Ain série 2L non classé.

[5] “ Gauthier écrivait au mois de germinal dernier, une lettre à son père...dans laquelle il disait, nous verrons aujourd’hui si nos prétendus patriotes oseront dire du mal de Robespierre ”. A.C.Bourg I47bis.

[6]Gauthier des Orcières dans sa dénociation au Comité de Salut Public de certains arrêtés d'Albitte écrit : "son coeur dément ce que sa main signe ".