pluviôse an II : la chasse aux suspects

2.43 La grande chasse

 

La politique de chasse aux suspects s'étend à tout le département et déborde des limites géographiques pour s'étendre jusqu'à Paris. Suite aux renseignements pris par Dorfeuille, Millet, Bonnerot et Frillet, Albitte demande au Comité de Sûreté Générale, durant la première décade de pluviôse an II, l'arrestation des principaux fédéralistes de l'Ain, alors en fuite dans la capitale. Il s'agit de Pagès, Tardy, Morel, Bugey, Midan, Billon et Gaillard. A Bourg, le comité de surveillance donne son avis, le 18 pluviôse, sur l'examen de onze suspects détenus pour "faits de destitution et de suspicion "1 c'est-à-dire d'anciens fédéralistes ; aucun n'est libéré. A Trévoux, la toute puissante société des sans-culottes définit le terme de suspect dans un discours de Limandas “qui propose de déclarer suspecte toute personne qui parlera de paix avant la destruction des tyrans2. Le 18 pluviôse, à Montrevel, Alban et Vauquoy font arrêter, de leur propre autorité les citoyens Didier et Vernette puis distribuent à la population des œufs trouvés chez ce dernier et en profitent pour emmener avec eux un fusil double. De retour à Bourg, ils passent à Pont-de-Vaux et se rendent à la société populaire pour faire un discours. Alban “se vante d'avoir dénoncé le représentant Gouly, qu'il traita de gueux, de scélérat et qu'il n'aurait pas gardé la place de maire à laquelle Gouly l'avait nommé si Albitte n'avait pas confirmé sa nomination. Il tint plusieurs propos tendant à jeter la discorde et la division dans la société et prenant un pistolet dans chaque main, il dit que sachant qu'on était pas en sûreté au milieu d'eux il était venu armé; il ajouta qu'il fallait exclure tous les riches, les plumassiers, et ne conserver que les tabliers de peau comme lui. . .voyant un vieillard près de lui, Alban en le prenant par la main lui dit, ne crains rien, mon ami, le patrimoine des riches sera celui des pauvres"3. L'attitude provocante et le vocabulaire des sans-culottes, urbains lâchés dans les campagnes, éveillent une certaine crainte parmi les ruraux. Celle-ci est plus accrue lorsque Millet, Bonnerot ou Vauquoy se présentent à leurs interlocuteurs comme des adjoints de la Commission Temporaire de Lyon.

Avec sa main mise sur les administrations, la sans-culotterie bressane ne se contente plus de l'influence qu'elle exerce sur une partie de la Bresse, elle veut l'étendre au département à commencer par Belley en se faisant les juges des actions de la société populaire belleysane. La société des sans-culottes de Bourg commence par se mettre en désaccord avec la société de Belley au sujet d’une adresse faite à la Convention par cette dernière sur la libération de Blanc-Désisles, Rollet-Marat et Convers. Même si un membre de la société de Belley présent à Bourg dénonce les manœuvres de trois belleysans proches de Gouly, la société de Bourg décide d’envoyer une adresse à la Convention pour l’éclairer sur la situation révolutionnaire de Belley.

 

d'après la thèse de doctorat d'histoire de Jérôme Croyet, "sous le bonnet rouge", soutenue et obtenue en 2003 à l'Université Lumière Lyon II

 

1Registre du comité de surveillance de Bourg. A.D. Ain 14L 16.

2 Registre de la société des sans-culottes de Trévoux. VALENTIN SMITH : Bibliothéca Dombesis.

 

3Témoignage d'Etienne Bazard, cahier de témoignage c. A.D. Ain ancien L219.

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