1789-1799 sous le bonnet rouge : fêtes et croyances au XVIIIe

Si l’éducation et l’alphabétisation dont des progrès dans les pays de l’Ain, les mythes et les croyances populaires, fortement emprunt d’esprit traditionaliste païens, sont fermement implantés dans les mentalités.

Jusqu’à la moitié du XIXe siècle le 25 décembre chômé n’existe pas. En effet, le 25 est une journée comme les autres où chacun vaque à ses occupations jusqu’à la fin de journée : le 25 décembre 1791, le municipalité de Trévoux émet 4 000 billets de confiance. Les administrations traitent leurs affaires même jusque tard dans la nuit du 24 et en 1794,  les membres du district de Bourg ou du département après avoir quitté leur travail se rendent à la société populaire de Bourg. Le même jour, en 1810, ce sont des vandales qui ne chôment pas et qui volent les vases sacrés de l’église de Beynost alors que durant la messe, à Nievroz, des cambrioleurs officient.

Dans les campagnes, la seule vraie festivité est la Messe de Minuit avec, au retour, le cevis « civier » ou du millet et du boudin cuit avec des petites saucisses, de l’huile et du saindoux. Les artifices ne sont pas légions. Il n'y a ni sapin, ni décorations mais une bûche, « la grouba de chalende », mise cérémonieusement au feu et parfois une petite crèche dans laquelle on pose l'Enfant Jésus et devant laquelle on chante tous ensemble. Ces cantiques de Noël sont répandus et chantés par tous, tel ce "Noël de Bourg" qui raconte que l'Enfant Jésus, enfin né, grelottait dans la Crêche : "Dès que la ville de Bourg, Eut appris la grande nouvelle, On fit battre le tambour, Pour tout mettre en écuelle, Les poulardes, les chapons, Les saucissons , les jambons, Les dindonnaux à foison". Sous l’Ancien-Régime, la fête de Noël donnait lieu, à Bourg et dans la Bresse, à de grandes réjouissances populaires, des charivaris et un bal, au son de la vielle et de la musette. Les cadeaux n'abondent pas, parfois un petit jouet de bois taillé ou des rubans et des tissus pour le confection des nouveaux vêtements. A partir du début du XIXe siècle, le cadeau le plus répandu est quelques papillotes et une orange, fruit exotique et rare. Noël est l’occasion d’un bain de pieds chaud réputé protéger des morsures de reptiles.

 

            Ces rites magiques de rebouteux sont une partie importante de la culture et de la posologie opothérapique rurale de l’Ain, que la Révolution va bouleverser. Jusqu’au XVIIIe siècle, la sorcellerie a été longtemps l’explication religieuse à ces rites et croyances païennes. Ces dernières, dans l’Ain étaient nombreuses et variées. Ainsi, afin de faire disparaître les pêchés d’un défunt, il fallait l’enterrer avec des objets usuels. En Bresse, il fallait fêter le serpent à certains jours pour na pas qu’ils pulluent toute l’année. De même, il ne fallait pas détruire les araignées sans quoi les bêtes devenaient boiteuses. Dans l’Ain, une pratique voulait qu’il faille toucher quelque chose de malpropre avant de jouer pour gagner aux jeux.

Les feux de la St Jean en Bugey et Revermont sont hérités du culte purificateur du feu des Ambarres. En Dombes, à Châtillon, un arbre redonnait vigueur aux enfants et aux vieillards tandis que les bois de St Guignefort étaient fréquentés par les jeunes filles cherchant un mari. A Ambronay se trouve, fixé à un pilier de l’église, un anneau qui retint le Diable tandis qu’à

A ces superstitions sorcelleuses, se joignent des êtres magiques. Ainsi, les abords du lac d’Ambléon sont hantés par la Givre. En Bresse, le cheuchon, esprit malfaisant nocturne, hante les cauchemars. La vouivre, serpent ailé, quant à elle, s’embusquait dans la descente de Matafelon jusqu’à ce qu’elle se réfugie à la source de la Loue. Dans les environs de Bourg, entre Châlles et la forêt de Seillon, sévissent les sénégougues, esprits volants crieurs qui disparaissent après 1815. Dans le Bugey, entre Agris et Evosges règne le sarvan, bon esprit juste prenant souvent la forme d’un chat noir.

 

            A côté des réminiscences vivaces de ses expressions populaires la médecine fait au cours du XVIIIe siècle de grands progrès dans l’Ain par l’intermédiaire de l’école de médecine de Bourg et l’apparition d’explications raisonnés à des phénomènes naturels par la Société d’Emulation de l’Ain, dès 1755.

 

 

d'après la thèse de doctorat d'histoire de Jérôme Croyet, "sous le bonnet rouge", soutenue et obtenue en 2003 à l'Université Lumière Lyon II

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